Parce que Feiz e Breizh se veut missionnaire en Bretagne, terre des prêtres, et pas seulement deux jours par an, nous lançons pour la première fois cette année : Feiz e Breizh Noz, une marche de nuit aux flambeaux pour les vocations. Ce pèlerinage est ouvert à tous.
1ère édition
Dates :
Nuit du 16 au 17 décembre 2022
Thème :
"Bretagne, terre des prêtres, prions pour les vocations"
Récit d'un pèlerinage nocturne
« La multitude des efforts humains vers le beau, le bien, le meilleur, fait monter l'humanité continuellement comme un mouvement de houle qui gonfle la masse de l'océan. […] Chacun de nos efforts use ce qu'il y a de matériel et de terrestre en nous, et le mouvement de tous ces efforts humains est comme un mouvement irrésistible et éternel de galets et de houle qui creuse notre chemin vers l’infini. »
Les mots de Guy de Larigaudie sont éloquents de vérité… Ce vendredi soir, nous quittions nos occupations, nous terminions un travail laborieux, nous étions éreintés par la semaine éprouvante, mais la journée commençait à peine. Non pas comme des ombres, mais comme des lumières d’Évangile, nous avions décidé de conquérir la nuit dans la ferme intention de faire plier le Bon Dieu à notre requête ; Seigneur donnez-nous des prêtres, beaucoup de prêtres, beaucoup de saints prêtres !
Notre Bretagne, terre de prêtres pendant des siècles, terre de missionnaires jusqu’à il y a peu, est aujourd’hui devenue terre de mission. Il y a eu un catholicisme typiquement breton qui faisait de l’homme breton un catholique différent, imprégné de traditions, de la langue et de la musique bretonne. La déchristianisation fatale de la France n’a malheureusement pas épargné la Bretagne. L’homme breton voit sa foi bouleversée par une religion dont on banni toute culture. Cela provoque un désert spirituel par la non transmission de l’héritage culturel et spirituel breton et bien évidemment le tarissement des vocations. Après avoir été synonyme de puissance, l’Eglise en Bretagne choisi l’effacement et relègue un certain nombre de traditions bretonnes au rang de reliquat de superstitions.
Face au bouleversement de la foi en bretagne, il existe heureusement des initiatives privées venant de personnes conscientes de la richesse du passé et ayant la volonté de rendre sa culture religieuse unique à la bretagne. Les solutions, ce sont aux Bretons de les trouver et de remettre l’âme bretonne à sa juste place : au cœur du catholicisme.
Les complies étaient passées mais près de deux cent cinquante pèlerins s’engagèrent à rompre le silence de la nuit quand à 23h00 ils quittaient en procession la chapelle Notre-Dame du Loc de Saint-Avé (56). Trente kilomètres plus loin, sainte Anne, du haut de sa statue givrée et trônant sur sa basilique, attendait patiemment ses Bretons chéris. Le gel passerait bien, la foi s’ancrerait quant à elle. Un pèlerinage ardu dont seule la lumière des fambeaux balise l’itinéraire ; un pèlerinage d’hiver quand le mercure est au négatif ; une marche rude quand la fatigue vous lorgne. Mus par l’espérance de l’Avent, nous autres, pèlerins, n’avions qu’à penser au souffle du bœuf sur la mangeoire honteuse dans laquelle saint Joseph dut se résigner à coucher l’Enfant-Dieu.
Le cœur de la Sainte Vierge à tout pouvoir sur son Fils. Alors nous avons cherché à attendrir ce cœur de mère au gré des chapelets et de la marche. Dans le bocage et dans les hameaux, entre les talus et le long des champs, nos pas martelaient encore cette prière. Qu’il est doux de retrouver une chrétienté virile et fière, enracinée dans la terre. Et quand la flamme de nos torches faisait encore scintiller l’herbe solidifiée par le gel, nous redoublions de chants et de prières. Jeunes et moins jeunes, mariés, fiancés ou célibataires, tous marchaient pour que la volonté de Dieu soit faite.
Aujourd’hui, il nous faut marcher d’un même élan dans les pas que nos ancêtres ont tracés sur les chemins bretons. La jeunesse est la nouvelle détentrice de la chrétienté en Bretagne. Héritière de la résistance chrétienne et des combats de chouannerie pour Dieu et le pays, elle est présente ce soir pour marcher et prier pour sa patrie, riche de traditions.
Plusieurs chapitres serpentaient ainsi dans les chemins. Çà et là, les feux réconfortants et la soupes chaleureuse agrémentaient notre trajet lors des pauses méritées où, par je ne sais quel effet surnaturel, les chants et la clameur des conversations disaient tout de la force de l’amitié et de l’abnégation. L’effort ainsi partagé devenait une sucrerie par laquelle on ne se sentait que faibles participants. De simples tailleurs de pierres, voilà ce que nous étions. Un jour nos cailloux supporteraient une cathédrale.
Il plut des grâces en torrent jusqu’à notre arrivée, huit heures plus tard, à Sainte-Anne-d’Auray. Après un petit déjeuner au Foyer Saint-Jean-Paul-II, nous pûmes vénérer les reliques du pape polonais avant de nous rendre à la crypte du mémorial du sanctuaire afin d’y entendre la Messe. Une rangée de torches accueillait les pèlerins qui s’engouffraient sous la terre alors que, plus haut, pleuraient cornemuses et bombardes. Cette ultime complainte, patriotique et superbe, cajolait notre fatigue comme pour nous dire que « notre effort n’est pas inutile » (Guy de Larigaudie). C’est ainsi que nos âmes se sont élevées d’une voix pour demander encore et encore au Bon Dieu d’envoyer des ouvriers à sa moisson.
Il existe encore des prêtres qui croient au destin catholique de la Bretagne et oeuvrent pour redonner à la langue bretonne sa place dans l’Eglise. Il y a même des vocations de prêtre qui naissent par le sentiment d’être breton.
En sortant de la crypte, le soleil avait fini de poindre, victorieux sur la nuit. Ainsi, s’acheva notre longue prière itinérante. Le dégel commençait à peine mais nos cœurs étaient bouillonnants.
Il n’y a pas de fatalité au drame de l’âme religieuse bretonne en péril avancé. Il reste cette jeunesse chrétienne qui n’est pas un reliquat édulcoré d’anciennes traditions passéistes.
La foi bretonne n’est pas morte ! Elle a veillé la nuit du 16 au 17 décembre 2022, jusqu’à l’aube de la Saint-Gaël, roi de Bretagne. Debout comme Jean-Pierre Calloc’h l’avait été avant nous :
« Nous sommes les chevaliers de tes rêves, les prêtres des autels que tu aimais, les conducteurs de peuples, les sauveurs de pays ».